De la plomberie haute technologie pour Energy Observer
Energy Observer soigne les détails. Le catamaran expérimental optimise l’ensemble de ses systèmes pour améliorer son rendement mais aussi le confort de l’équipage. Explications par Roland Reynaud, ingénieur embarqué.
Pierre angulaire du modèle énergétique de demain, l’hydrogène est au cœur du projet Energy Observer. C’est ce petit atome, à la fois si commun et si précieux, qui prend le relai de l’ensemble de la chaîne de production d’énergie lorsque les autres sources d’énergies renouvelables, le solaire et l’éolien, ont jeté l’éponge. La mise en œuvre de cette technologie innovante demande de l’expérience et une vision d’ensemble des systèmes, pour optimiser et mutualiser les flux, les calories et donc l’énergie produite comme celle consommée.
Deux ingénieurs veillent au quotidien sur l’ensemble du circuit hydrogène du bord et profitent de ce chantier d’hiver pour améliorer le système, et gagner quelques bon points de rendement.
“Nous sommes en train de modifier l’ensemble des circuits hydrogène. Quelque part, cela tombe bien, puisque l’implantation des deux nouvelles ailes nous oblige à déplacer les évents et les cheminées hydrogène. On en profite pour refaire les « platines gaz » qui étaient exposées aux embruns.”
La corrosion est aussi un vaste domaine de recherche et de développement à bord de ce laboratoire flottant, qui permettra bientôt de proposer des solutions fiables aux installations en bord de mer.
Ces optimisations passent aussi par une analyse fine des circuits.
“Nous avons de nouveau identifié des points à améliorer, poursuit l’ingénieur. Nous allons supprimer un maximum de « coudes » qui occasionnent de la stagnation d’eau, par condensation par exemple, ce qui empêche l’hydrogène de circuler librement et provoque de la perte de charge.”
Comme tout prototype, Energy Observer évolue au fur et à mesure que le projet avance. Les soudeurs-tuyauteurs, spécialistes de l’assemblage inox guidés par les ingénieurs, sont venus souder les 150 mètres de tubes inox d’un circuit d’hydrogène optimisé.
Mariage des cultures de la course au large et de l’ingénierie gazière, les fameuses « platines gaz » qui reçoivent de nombreux équipements, ont délaissé l’alliage d’inox pour le « composite » beaucoup plus léger et adapté à cet environnement hostile.
« Récupérer chaque calorie »
Autre dossier: le rendement thermique de la pile à combustible. La pile produit de l’électricité mais aussi de la chaleur lorsqu’elle fonctionne. Jusqu’à présent l’accent avait été mis sur le versant électro-chimique, la partie thermique étant en partie délaissée de l’aveux même du spécialiste.
“Une pile c’est 50% d’électrique et 50% de thermique. Jusqu’à présent, on se contentait de chauffer le ballon d’eau chaude du bateau et la nacelle. Nous sommes partis du constat que nous avions « trop » d’énergie lorsque la pile était en fonction et que nous en manquions lorsqu’elle était arrêtée.”
Sachant qu’à la sortie des échangeurs de la pile à combustible, le thermomètre affiche 70°C pour un débit d’environ 20 l/mn, une cuve de 500 litres d’eau est chauffée lorsque le pile fonctionne. Une fois la pile à l’arrêt, cette eau va être utilisée pour réchauffer les organes nécessitant de la chaleur pour démarrer, mais aussi l’intérieur du bateau tout en alimentant les équipements électroménagers du catamaran. La chaleur dégagée par l’électrolyseur et celle dégagée par les moteurs électriques vont elles aussi être récupérées.
Là encore, c’est l’ensemble des circuits en composite qui ont été repensés.
« Nous essayons de récupérer chaque calorie, souligne Roland Reynaud. Sur le circuit « eau chaude », cela représente environ 20 kWh. »
Des calories qui vont être très précieuses pour l’équipage qui met le cap vers le Nord de l’Europe dès le mois prochain…