Diminuer l'empreinte carbone de nos déplacements
Le défi "Quentin Express"
La semaine dernière s’est déroulé le “Quentin Express” : Energy Observer Foundation et l'équipe France SailGP se sont embarqués pour un voyage de Barcelone à Saint-Tropez, en utilisant uniquement des moyens de transport à faible émission de carbone. L'occasion de mettre en avant les différentes solutions qui peuvent contribuer à limiter l'empreinte carbone dans la mobilité et attirer l'attention sur l'importance des émissions indirectes de gaz à effet de serre des évènements.
Le secteur de l'événementiel dans son ensemble peut contribuer à hauteur de 10 % aux émissions mondiale de gaz à effet de serre ! Cela comprend divers éléments tels que le choix des matériaux utilisés, la consommation d'énergie et le transport des participants vers les lieux des événements, ce qui représente une empreinte carbone significative. Comment pouvons-nous évaluer ces émissions ?Quels critères doivent être pris en compte dans cette analyse et quelles stratégies peuvent être mises en place pour réduire cet impact environnemental ? Éléments de réponse avec Beatrice Cordiano, scientifique embarquée à bord d'Energy Observer.
Le scope 3 du bilan carbone
Pour s'attaquer aux émissions de carbone, il est important de comprendre leur origine. Vous avez probablement tous déjà entendu parler des émissions directes et indirectes dans le contexte de la comptabilité carbone, mais que savez-vous des scopes 1, 2 et 3 ?
Il s’agit de trois champs d'application qui permettent de classer les émissions d'une entreprise par catégorie. En gros, le scope 1 correspond aux émissions "directes", à savoir toutes celles qui découlent des activités internes à l’entreprise, telles que l’utilisation des machines, la fabrication des produits, le chauffage des bâtiments, l'utilisation des ordinateurs, etc. Le scope 2 comprend les émissions "indirectes" - c'est-à-dire celle qui ne sont pas générées par l'entreprise elle-même mais produites par la source d’énergie utilisée. Enfin, le scope 3 rassemble toutes les émissions indirectes associées aux fournisseurs et aux clients de l'entreprise, aux déplacements, créant ainsi une toile complexe d’interactions. Ces dernières sont de loin les plus importantes - couvrant plus de 70 % de l'empreinte carbone d'une entreprise - et elles sont souvent les plus difficiles à maîtriser.
“Avec l’Impact League, le podium pour la planète, toutes les équipes jouent le jeu. Au-delà de la démarche responsable, l'aspect compétitif incite à trouver des solutions d’optimisation ou tout simplement à faire les choses différemment.”
L’industrie événementielle ne fait pas exception. Lorsqu'il s'agit d'événements avec une présence sur place, le scope 3 regroupe toutes les émissions provenant de la production et du transport de biens et de services, y compris la nourriture, les marchandises ou le matériel de scène, des logements pour les participants et le personnel de l'événement et bien sûr... le transport des participants sur le lieu de l'évènement.
Repenser notre façon de voyager
Prenons l'exemple du championnat SailGP 2022-2023 : selon leur rapport, l'empreinte carbone totale de l'événement s'élevait à 79 786 tCO2e. Le scope 3 représentait 98,16 % des émissions et, plus précisément, le transport du personnel a contribué à hauteur de 14,2 % du scope 3, soit à 4 407 tCO2e. Un chiffre exorbitant qui devient minuscule comparée aux 48 645 tCO2e rejetées pour les déplacements des supporters. En somme, le transport a représenté plus de 65 % de l'empreinte carbone totale de l'événement. Pour mettre les choses en perspective, cela équivaut à 7,3 millions de repas à base de viande, à 2,3 millions de jeans ou encore aux émissions d'un passager effectuant plus de 53 000 allers simples de Paris à New York en avion.
Voici pourquoi il est impératif de promouvoir la durabilité environnementale dans l'organisation d'événements, dans les stratégies de déplacement des entreprises et, dans une plus large mesure, au sein du secteur mondial des transports. Mais le transport lié aux événements n'est en fait qu'une petite portion du problème.
D'un point de vue plus global, le transport est un pilier fondamental de nos sociétés modernes : il tisse des liens entre les personnes, les communautés, les pays, les continents et les cultures, favorise le commerce international des marchandises, garantit l'accès à des services publics essentiels tels que l'éducation et les soins de santé et stimule la croissance économique en rapprochant les régions éloignées. Nous ne pouvons tout simplement pas nous en passer. Cependant, son impact sur l'environnement est loin d'être négligeable. Encore largement tributaire des moteurs à combustion interne fonctionnant aux combustibles fossiles, l'industrie des transports est responsable à elle seule d'un tiers des émissions de CO2 provenant des secteurs d'utilisation finale. Nous devons repenser notre façon de voyager, en limitant nos déplacements et en privilégiant des alternatives à faible émission de carbone chaque fois que cela est possible.
Pour mieux comprendre les solutions disponibles et leur impact, il est essentiel de comparer les émissions de carbone des différents modes de transport. Une manière de le faire est d'évaluer la quantité de CO2 émise par kilomètre et par passager. Ce n'est pas une tâche facile car de nombreux facteurs entrent en jeu tel que le modèle du véhicule, son lieu de fabrication, sa longévité, la vitesse de déplacement, les conditions de circulation, le mix énergétique du pays dans le cas des véhicules électriques et bien d'autres encore.
Sur une échelle allant de la marche à l'avion
Avec environ 230 gCO2/km émis par passager, il est indéniable que l'impact environnemental de l'avion est le pire qui soit. La voiture arrive en deuxième position dans le classement des modes de transport les plus polluants. Avec une empreinte carbone qui varie de 190 à 218 gCO2/km par personne, qu’il s’agisse d’une voiture à essence ou d'une voiture diesel, c’est le mode de transport le plus utilisé.
Toutefois, les voitures ont la possibilité de devenir moins émettrices, notamment avec l’émergence des véhicules électriques (VE) qui représentent actuellement la meilleure option pour le transport privé. Contrairement à leurs homologues thermiques, les VE émettent considérablement moins d'émissions de gaz à effet de serre, même dans les régions où l’électricité est principalement produite à partir de sources à forte teneur en carbone. Bien que la phase de fabrication des voitures électriques puisse engendrer plus d'émissions par rapport aux véhicules à combustion interne, cette différence est largement compensée au cours de leur cycle de vie.
“Un véhicule à hydrogène est complémentaire à un véhicule à batteries. Le plus important avec ces véhicules, c'est de préserver l'énergie ! Il faut donc adopter l'éco-conduite !”
En France, par exemple, une voiture électrique émet 2 à 3 fois moins qu'un véhicule thermique et ce gain se creuse à mesure que le mix électrique du pays devient plus vert. Au fur et à mesure que la technologie se développe, le paysage du transport durable évolue, avec les voitures à hydrogène (FCEV) qui gagnent du terrain.
Tout comme les VE, les FCEV présentent un bilan carbone compétitif, émettant jusqu’à 75% de moins qu'une voiture diesel lorsque l'hydrogène est produit par électrolyse de l'eau alimentée par de l'électricité du réseau français. Comparer précisément les empreintes carbones des VE et des FCEV peut être complexe, mais il est clair que les voitures à hydrogène offrent une plus grande autonomie et une recharge plus rapide que les VE traditionnelles, tout en présentant des avantages environnementaux significatifs. L'avantage est là et il est indéniable.
Si l'on poursuit sur les autres types de mobilité, le train est l'alternative la plus respectueuse de l'environnement et son impact varie en fonction de sa catégorie : le TGV n'émet que 2,4 gCO2/km, l'Intercité 5,9 g et le TER 29,6 g. Opter pour le train plutôt que l'avion ou la voiture constitue un choix significatif pour réduire la pollution.
Enfin, au bas de l'échelle des transports bas-carbone se trouvent les vélos, un classique précieux. Bien que leur fabrication s'accompagne, comme pour tout produit industriel, d'une petite empreinte carbone, les bicyclettes ne produisent absolument aucun gaz à effet de serre pendant leur utilisation, ce qui en fait la solution la plus efficace et la plus durable pour les courts trajets en milieu urbain.
La transition vers un mode de transport plus respectueux de l'environnement devient de plus en plus vitale et chaque choix que nous faisons - qu'il s'agisse de choisir un véhicule électrique ou d'opter pour les transports publics ou le covoiturage - contribue à un avenir plus durable. Néanmoins, n'oubliez pas que l'une des meilleures décisions que vous puissiez prendre à titre d'initiative personnelle pour lutter contre le changement climatique est de vous mettre au vélo ou à la marche. Alors, marchez, faites du vélo, et si vous ne pouvez pas, choisissez en tout connaissance de cause !
Pour aller plus loin
- Les minéraux critiques, héros de la transition énergétique - Energy Observer- 5 conseils pour réduire l'empreinte carbone de vos événements - Greenly
- Les voitures électriques sont-elles propres ? - Transport & Environnement
- Transport à faible impact - Datagir
- Factcheck : Comment les véhicules électriques aident à lutter contre le changement climatique - Carbon brief